«Bordeaux 80», «Mériadeck 2000» ...
Figure d’un nouvel âge urbain, Bordeaux, pour rayonner sur l’Aquitaine, voulait jouer la carte de la modernité. Urbanisme de dalle, architecture moderne, le quartier bénéficiait de toutes les dernières technologies, des procédés avant-gardistes, de tous les nouveaux esthétismes. Ainsi, les bâtiments AGF et l’hôtel de la CUB ont des structures en béton précontraint, procédé rare pour l’époque ; les bâtiments publics sont chauffés par géothermie, que la ville développe alors dans différents points de l’agglomération. Plus ponctuellement, divers éléments revoient directement à une image d’ultra modernité, comme les différents systèmes de vidéosurveillance des parkings, des ascenseurs parlant tout seul, des systèmes de climatisation, jusqu’au design des postes de surveillance.
Image d’une certaine modernité
Mais cette ultra modernité affichée n’est qu’image, et n’a pas d’autre velléité que de l’être. Les formes ainsi projetées n’ont pas de réelle fonction, si ce n’est finalement d’être visible et de renvoyer une image de modernité. Ainsi, à l’image de la villa dans le film de Jacques Tati, Mon Oncle, l’espace et la forme sont plus contraignants par les règles qu’ils mettent en place que par le confort que le statut moderne de la villa semblerait promettre.
L’hôtel de la CUB est le point culminant de cette ultra modernité, son architecture stigmatise toutes les récurrences du quartier, en en poussant chaque élément à son paroxysme. Ainsi, le bâtiment devient lui-même une Venise dont l’accès se fait par de multiples passerelles. Ces bassins, tout comme les autres éléments que Willerval imposait alors aux différents architectes, ne trouvent aucune véritable justification au sein du bâtiment. De même, la transparence est omni présente dans tout le rez-de-dalle, qui se trouve ainsi privé de toute fonction.
Pour achever la composition, et définitivement en prouver la modernité, on fait appel à Pierre Guariche, alors célèbre designer Parisien, pour concevoir le mobilier du bâtiment.
IIllustration tirée d’une brochure de 1970, Bordeaux 80 sort de terre
Mériadeck est une image de modernité, exacerbée, étirée pour paraître plus forte, alors que le quartier ne joue en fait que sur des formes et des principes déjà largement utilisés, et même finalement déjà périmés. Architecture de verre, transparence, effacement des limites entre l’extérieur et l’intérieur, tous ces principes prétendument modernes, et donc en quelques sortes avant-gardistes, étaient déjà parodiés dans des œuvres telles que le film Play Time de Jacques Tati, qui nous présentait dès 1967, une ville dont les immeubles, tous semblables, sont déjà des caricatures de ce que sera l’hôtel de la CUB, dont les travaux commenceront en 1976, soit 10 ans après.
Salle de contrôle du parking Front du Médoc.
Dessin d’un projet de signalétique en 1976
Play Time de Jacques Tati
Dessin d’un projet de palissade de chantier en 1976
Image d’une certaine modernité
© 2011 m cisnal